L’intelligence artificielle au service de l’accessibilité numérique : vraie révolution ou fausse promesse ?
La recherche et le développement ont permis d’énormes avancées en matière d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap. Parmi les innovations récentes, l’intelligence artificielle (IA) offre un potentiel immense pour rendre le numérique plus inclusif. Cependant, malgré ses avantages, l’IA soulève également des questions quant à son impact sur l’accessibilité numérique. En quoi l’intelligence artificielle est une alliée dans ce domaine et quels sont les obstacles qu’elle peut représenter ?
Comment fonctionne l’IA ?
L’intelligence artificielle ouvre de nouvelles possibilités pour l’accessibilité numérique, permettant de développer des solutions inédites. Avant d’évoquer les bienfaits et les inconvénients que peuvent générer l’intelligence artificielle, il est important de comprendre comment elle fonctionne.
Le Machine Learning (ML) et le Deep Learning (DL) sont des technologies clés de l’intelligence artificielle qui permettent de créer des solutions innovantes, capables d’adapter les interfaces et d’améliorer l’accès au numérique pour tous. Bien que souvent utilisés de manière interchangeable, le ML et le DL diffèrent dans leur complexité et dans leur manière d’apprendre à partir de données.
Le Machine Learning
Le Machine Learning (ML), ou apprentissage automatique, est une méthode qui permet aux machines d’apprendre à partir de données et de s’améliorer avec le temps sans nécessiter de programmation humaine spécifique pour chaque tâche. Le ML repose sur des algorithmes capables de reconnaître des motifs et de faire des prédictions, en traitant de grands volumes de données variées.
Dans le domaine de l’accessibilité numérique, le ML est utilisé pour des applications comme la reconnaissance vocale, qui permet de contrôler des appareils par la voix, ou encore la reconnaissance d’images, essentielle pour décrire du contenu visuel aux personnes malvoyantes. Par exemple, un algorithme de ML peut analyser une image et fournir une description vocale ou textuelle pour en transmettre le contenu.
Le Deep Learning
Le Deep Learning (DL) est une sous-catégorie du Machine Learning, qui fonctionne sur la base de réseaux de neurones artificiels. Inspirés de la structure du cerveau humain, ces réseaux de neurones permettent de traiter des données de manière plus complexe et nuancée, en analysant des couches successives d’informations (d’où l’appellation de « deep », qui signifie « profond »). Grâce à cette architecture, le DL excelle dans des tâches comme la reconnaissance vocale, l’analyse d’images, et la compréhension du langage naturel avec un niveau de précision et de détail bien plus élevé.
Dans le contexte de l’accessibilité, le DL est utilisé pour des applications avancées comme la génération de sous-titres automatiques en temps réel pour rendre les vidéos accessibles aux malentendants ou la traduction de la langue des signes en texte, en interprétant les gestes et expressions faciales capturés par des caméras, facilitant ainsi la communication numérique.
L’IA, un levier pour améliorer l’accessibilité numérique
En permettant aux machines d’apprendre et de s’adapter, le Machine Learning et le Deep Learning jouent donc un rôle dans l’amélioration de l’accessibilité numérique. Ils ouvrent la voie à des interfaces plus intuitives et adaptées aux besoins des personnes en situation de handicap.
Voici trois catégories pour lesquelles l’IA peut bénéficier à l’accessibilité numérique :
La transcription automatique et la synthèse vocale
Les outils de transcription automatique, comme ceux intégrés dans certaines applications et plateformes vidéo, permettent aux personnes malentendantes d’accéder plus facilement aux contenus audio. En convertissant la parole en texte, ces outils offrent des transcriptions en temps réel, essentielles pour suivre des conférences, des cours ou des réunions en ligne. De même, la synthèse vocale a rendu le web plus accessible aux personnes malvoyantes ou aveugles, en transformant le texte en audio de manière dynamique.
Les assistants virtuels et les interfaces vocales
Les assistants virtuels, comme Siri, Google Assistant ou Alexa, sont désormais utilisés par des millions de personnes pour naviguer dans l’univers numérique. Ces outils sont particulièrement bénéfiques pour les personnes avec des limitations de mobilité ou des handicaps visuels, car ils permettent de réaliser des actions sans interaction physique avec l’appareil. Ils facilitent aussi l’accès à l’information, en rendant les recherches plus intuitives et accessibles par la simple commande vocale.
L’analyse d’image pour l’accessibilité visuelle
Les outils de reconnaissance d’image basés sur l’IA, comme ceux intégrés dans les réseaux sociaux, permettent de décrire les photos de manière automatisée. Des applications comme Seeing AI ou Lookout de Google offrent une description vocale des éléments visibles dans une image, aidant ainsi les utilisateurs malvoyants ou aveugles à percevoir visuellement leur environnement. Cette avancée, bien que perfectible, marque un pas important pour améliorer l’inclusion.
Les limites de l’IA pour une accessibilité numérique inclusive
Malgré les avancées significatives, l’IA présente également des limites qui peuvent parfois aller jusqu’à l’encontre des principes de l’accessibilité numérique. Certaines de ces limitations sont liées à des biais inhérents aux systèmes d’IA, qui peuvent affecter la qualité et l’inclusivité de ces outils.
Voici trois points pour lesquels l’IA peut nuire à l’accessibilité numérique :
Les biais dans les algorithmes
Les algorithmes d’intelligence artificielle sont souvent formés sur des ensembles de données qui ne représentent pas forcément la diversité de la population. Par exemple, des modèles de reconnaissance vocale peuvent mal interpréter les accents, les variations de voix, ou les troubles de la parole. Ces biais réduisent l’accessibilité des personnes ayant des caractéristiques vocales distinctes. De plus, l’absence de diversité dans les données d’entraînement peut également affecter la reconnaissance faciale et limiter son efficacité pour certains groupes.
Les erreurs de compréhension et de retranscription
Bien que les transcriptions automatiques aient énormément progressé, elles ne sont pas toujours d’une précision optimale, notamment dans des contextes bruyants ou lors de discussions rapides. Ces erreurs peuvent altérer l’expérience utilisateur pour les personnes malentendantes, qui dépendent fortement de la justesse des sous-titres et transcriptions. Cette imperfection peut entraîner des confusions et limiter l’accès aux informations.
La dépendance technologique et l’exclusion numérique
La technologie IA reste coûteuse à développer et à maintenir, ce qui peut créer des inégalités dans son accessibilité. Certaines personnes en situation de handicap n’ont pas forcément accès aux appareils ou aux mises à jour nécessaires pour utiliser les outils d’IA les plus récents. Par ailleurs, une forte dépendance à ces outils peut conduire à des problèmes d’accessibilité si les outils d’IA eux-mêmes sont indisponibles ou fonctionnent mal.
Perspectives pour une IA plus accessible et inclusive
Pour que l’IA puisse réellement contribuer à une meilleure accessibilité numérique, elle doit évoluer vers une plus grande inclusivité et être développée en prenant en compte les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap.
Une des solutions pour limiter les biais dans les systèmes d’IA est d’intégrer des données plus diversifiées lors de l’entraînement des modèles. Il est essentiel d’inclure des exemples de voix, de visages, et de comportements variés afin de créer des outils plus robustes, capables de répondre à une pluralité d’utilisateurs. Cette approche permettrait de réduire les écarts de performance pour des profils variés.
Le développement de technologies inclusives doit nécessairement impliquer les personnes directement concernées. En collaborant avec les associations et en intégrant des utilisateurs en situation de handicap dès la conception, les entreprises technologiques peuvent mieux comprendre les attentes et les limites des outils qu’elles créent, et ainsi concevoir des solutions adaptées.
Des réglementations plus strictes peuvent aussi encourager les développeurs à inclure des critères d’accessibilité dès les premières étapes de la conception des produits basés sur l’IA. C’est en imposant des standards d’accessibilité que les législations nationales et internationales pourront renforcer l’obligation d’inclusion numérique.
RGAA, l’unique assurance d’une solide accessibilité numérique
L’intelligence artificielle a un potentiel extraordinaire pour améliorer l’accessibilité numérique, en offrant des solutions innovantes aux défis rencontrés par les personnes en situation de handicap. Cependant, elle comporte aussi des risques de renforcer les inégalités si ses limites et ses biais ne sont pas activement corrigés. L’IA ne peut être une véritable alliée de l’accessibilité numérique que si elle est pensée de manière inclusive, en plaçant les besoins des utilisateurs en situation de handicap au cœur de son développement. Les progrès technologiques et les efforts législatifs vis-à-vis de l’intelligence artificielle devront continuer à avancer pour garantir une accessibilité numérique réellement universelle.
Pour l’heure, il est essentiel que les entreprises intègrent l’accessibilité dans leurs stratégies digitales et appliquent les standards du web, le RGAA restant la seule ligne à suivre pour construire un espace numérique inclusif. D’autant plus que les nouvelles réglementations de 2025 vont renforcer les exigences envers les entreprises privées sous peine de sanctions en cas de non conformité.
C’est aussi là que l’humain reste irremplaçable : les audits d’accessibilité exigés par le RGAA reposent en grande partie sur une évaluation fine de la pertinence des contenus, de la clarté des alternatives textuelles ou encore de l’adéquation des solutions mises en place en fonction du contexte. Ces vérifications demandent un regard critique, une sensibilité à l’expérience utilisateur et une capacité à interpréter les éléments de manière explicite, que l’intelligence artificielle peine encore à maîtriser pleinement. Le jugement humain reste donc central pour garantir une accessibilité de qualité.
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